Formation ferrifère rubanée

Exemple de BIF (ici la Formation de Negaunee datant du Paleoproterozoïque à Jasper Knob, Michigan).
Échantillon d'un gisement de fer rubané de la péninsule supérieure du Michigan.
Bloc de fer rubané daté de -2,1 milliards d'années, découvert en Amérique du Nord.

Les formations ferrifères rubanées, aussi appelées formations de fer rubanées, gisements de fer rubané[a], BIF (pour l'anglais banded iron formations) ou itabirites, sont des roches sédimentaires très riches en fer (au moins 15 %). Elles représentent 90 % du minerai de fer exploité dans le monde. Les différentes couches sont de dimension millimétrique à centimétrique. Leur origine est majoritairement archéenne ; on les rencontre, sur toute la surface du globe, de −3 800 à −2 000 Ma environ.

Origine

Article détaillé : Histoire de la Terre.

L'océan primitif était un milieu plutôt réducteur, où le fer était en solution sous forme d'ions ferreux. La biosphère en a progressivement fait un milieu oxydant. L'apparition des gisements de fer rubané correspond à une oxydation de fer ferreux en fer ferrique.

Le fer ferreux (Fe2+), ainsi que le fer natif éventuellement présent (Fe0) ont été partiellement oxydés en fer ferrique (Fe3+), et avec l'apport d'oxygène, ont précipité en couches de couleur métalliques ou noirâtres, sous forme de magnétite (FeO-Fe2O3) et d'hématite (Fe2O3). Ces précipitations, qui reflètent ici des bouffées de conditions oxydantes, alternent avec des dépôts de schiste argileux et de carbonates siliceux, qui sont eux de couleur rougeâtre et sont déposés en milieu plus réducteur. La nature de l'alternance que reflètent ces dépôts n'est pas claire, il peut s'agir d'un cycle saisonnal, d'une instabilité biochimique, ou de tout autre phénomène cyclique.

La majorité des gisements ont été formés entre −2,5 Ga et −1,8 Ga. Leur formation est généralement interprétée comme étant consécutive au relargage massif d'oxygène libre (O2) par la photosynthèse cyanobactérienne, et l'augmentation consécutive de sa concentration dans l'océan. Par la suite, lorsque, au Paléoprotérozoïque, la plus grande partie des formes réduites du fer furent oxydées, la sédimentation de gisements de fer rubané s'est raréfiée et la teneur en O2 a alors augmenté dans les océans d'abord, dans l'atmosphère ensuite, pour se révéler hautement toxique pour les organismes anaérobies. C'est ce que l'on appelle la Grande Oxydation ou catastrophe de l'oxygène.

On trouve cependant de telles roches très tôt dans le registre géologique, dès −3,7 Ga[1]. Ces dépôts sont associés à une oxydation consécutive à une photosynthèse, mais plus probablement une photosynthèse anoxygénique apparue beaucoup plus tôt[2].

Photosynthèse anoxygénique

Les concentrations en phosphore et les traces de métaux dans les BIFs sont cohérents avec la précipitation due à l'activité de bactéries qui oxydent le fer[3].

Les proportions d'isotopes du fer dans les plus anciennes BIFs (3700-3800 Ma), à Isua au Groenland, s'expliquent mieux en supposant des niveaux de dioxygène extrêmement faibles (moins de 0,001% du niveau actuel) et par l'oxydation par photosynthèse anoxygénique de Fe2+[4],[5].

4 Fe2+ + 11 H2O + CO2 + hv → CH2O + 4 Fe(OH)3 + 8 H+

Cela implique que le processus biologique par lequel les micro-organismes remplacent le Fe3+ par l'oxygène dans la respiration (réduction dissimilante du fer) n'était pas encore répandue[4]. En revanche, les BIFs de type Lac Supérieur donnent des ratios d'isotopes du fer qui suggèrent que la réduction dissimilante du fer a énormément augménté durant cette période[6].

Une autre voie est celle de l'oxydation par des bactéries dénitrifiantes. Cela requiert la fixation biologique du diazote par des micro-organismes[5].

10 Fe2+ + 2 NO3- + 24 H2O → 10 Fe(OH)3 + N2 + 18 H+

Exploitation

Les gisements de fer rubané sont exploités comme minerai de fer, comme c'est le cas en Australie, Afrique du Sud et au Brésil. D'immenses gisements sont au stade exploratoire en Afrique occidentale et centrale[7].

Notes et références

Notes

  1. L'expression formation de fer rubanée est une traduction mot à mot de l'anglais, tandis que gisement de fer rubané ne s'emploie en principe que si la formation est exploitée comme minerai de fer.

Références

  1. Rosing MT, Rose NM, Bridgwater D, Thomsen HS, « Earliest part of Earth's stratigraphic record: A reappraisal of the> 3.7 Ga Isua (Greenland) supracrustal sequence. », Geology, vol. 24, no 1,‎ , p. 43–6 (DOI 10.1130/0091-7613(1996)024<0043:EPOESS>2.3.CO;2)
  2. Kappler A, Pasquero C, Konhauser KO, Newman DK, « Deposition of banded iron formations by anoxygenic phototrophic Fe (II)-oxidizing bacteria. », Geology, vol. 33, no 11,‎ , p. 865–8 (DOI 10.1130/G21658.1, Bibcode 2005Geo....33..865K, lire en ligne [archive du ])
  3. Kurt O. Konhauser, Tristan Hamade, Rob Raiswell, Richard C. Morris, F. Grant Ferris, Gordon Southam et Donald E. Canfield, « Could bacteria have formed the Precambrian banded iron formations? », Geology, vol. 30, no 12,‎ , p. 1079 (DOI 10.1130/0091-7613(2002)030<1079:CBHFTP>2.0.CO;2, Bibcode 2002Geo....30.1079K)
  4. a et b Andrew D. Czaja, Clark M. Johnson, Brian L. Beard, Eric E. Roden, Weiqiang Li et Stephen Moorbath, « Biological Fe oxidation controlled deposition of banded iron formation in the ca. 3770Ma Isua Supracrustal Belt (West Greenland) », Earth and Planetary Science Letters, vol. 363,‎ , p. 192–203 (DOI 10.1016/j.epsl.2012.12.025, Bibcode 2013E&PSL.363..192C)
  5. a et b Grant M. Cox, Galen P. Halverson, William G. Minarik, Daniel P. Le Heron, Francis A. Macdonald, Eric J. Bellefroid et Justin V. Straus, « Neoproterozoic iron formation: An evaluation of its temporal, environmental and tectonic significance », Chemical Geology, vol. 362,‎ , p. 232–249 (DOI 10.1016/j.chemgeo.2013.08.002, Bibcode 2013ChGeo.362..232C, S2CID 56300363, lire en ligne, consulté le )
  6. Clark M. Johnson, Brian L. Beard, Cornelis Klein, Nic J. Beukes et Eric E. Roden, « Iron isotopes constrain biologic and abiologic processes in banded iron formation genesis », Geochimica et Cosmochimica Acta, vol. 72, no 1,‎ , p. 151–169 (DOI 10.1016/j.gca.2007.10.013, Bibcode 2008GeCoA..72..151J)
  7. JF Moyen, 2007Gisement de fer rubané

Voir aussi

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Bibliographie

  • Gargaud M. & al. : L'environnement de la terre primitive, PUF de Bordeaux
  • (en) Joydip Mukhopadhyay, « Archean banded iron formations of India », Earth-Science Reviews, vol. 201,‎ , article no 102927 (DOI 10.1016/j.earscirev.2019.102927)

Articles connexes

Liens externes

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